Si je vous demande si vous connaissez les plantes adaptogènes, un grand nombre d’entre vous va me répondre par l’affirmative. Si ensuite je vous demande qui elles sont et quelles sont leurs particularités, les réponses sont souvent moins franches et moins spontanées. Les plantes adaptogènes sont les grandes inconnues de la famille médicinale.
Cela s’explique par plusieurs raisons : tout d’abord, elles ne sont, pour un grand nombre d’entre elles, pas issues de notre pharmacopée, ni française ni européenne. Ensuite, elles ne sont que peu enseignées dans les formations de phytothérapie. Tout ceci explique leur méconnaissance voire leur mésusage.
En effet, certaines d’entre elles ont été largement mises en avant par les médias ces derniers mois, présentées comme une panacée, un remède miracle. Il n’en est rien évidemment. Pour autant, ce sont des plantes aux multiples bienfaits qui méritent qu’on leur donne une place de choix au sein d’un enseignement de qualité.
En attendant, je vous propose une petite balade à la découverte de cette belle famille. Une introduction qui vous donnera envie, j’en suis sûre, de mieux les connaître.
Commençons par le début. Nous devons le concept de plantes adaptogènes à Nicolaï Lazarev, célèbre scientifique russe qui travaillait sur certaines plantes médicinales dont le ginseng et qui cherchait à en caractériser le mécanisme d’action. C’est en 1947 qu’il propose une définition officielle : une substance (et donc une plante) est dite adaptogène lorsqu’elle est « capable d’induire dans un organisme un état de résistance augmentée non spécifique permettant de contrebalancer les signaux de stress et de s’adapter à un effort exceptionnel ».
Les travaux de Nicolaï Lazarev ont ensuite été repris par Israel Brekhman, scientifique russe, qui a beaucoup travaillé sur l’éleuthérocoque. Il est d’ailleurs l’auteur de nombreuses publications sur celle qu’on surnomme le ginseng de Sibérie. À la définition de Nicolaï Lazarev, il associe 3 critères permettant de confirmer le caractère adaptogène d’une substance et donc d’une plante :
- Augmente la résistance de l’organisme contre une agression quelle qu’en soit la nature (physique, chimique ou biologique) de manière non spécifique ;
- A une influence normalisatrice, quels que soient les changements à partir des bases et des normes physiologiques ;
- Présente une absence de toxicité et n’influence pas les fonctions normales de l’organisme.
Si cette définition officielle est finalement assez récente, ces plantes sont présentes dans des pharmacopées du monde entier et cela depuis longtemps. Ainsi, l’éleuthérocoque, le ginseng, l’astragale de Chine, le schisandra sont utilisés en Médecine Traditionnelle Chinoise (MTC). L’ashwagandha en médecine ayurvédique. L’éleuthérocoque, la rhodiola, le ginseng en médecine traditionnelle russe. L’échinacée en médecine amérindienne, etc.
Mais le concept d’adaptogène ne s’applique évidemment pas seulement aux plantes : le shiitaké et le maïtaké sont des champignons adaptogènes présents de longue date parmi les références de la MTC.
Mais alors comment fonctionnent ces plantes adaptogènes ? Afin de bien comprendre leur mode d’action, il faut d’une part s’intéresser au concept de stress et d’autre part, les opposer aux plantes dites stimulantes.
On ne peut pas parler de stress sans dire quelque mot des travaux d’Hans Selye, un médecin endocrinologue ayant travaillé et publié de nombreux travaux et ouvrages sur le stress. C’est notamment au cours d’expérience chez l’animal qu’il a pu observer que face à différents facteurs d’agression, l’organisme réagit de façon similaire ; par ailleurs, dans certains cas, ces facteurs d’agression peuvent entraîner un déséquilibre à l’origine d’une maladie.
Hans Selye a ainsi défini le stress comme étant « l'ensemble des moyens physiologiques et psychologiques mis en œuvre par un individu pour s'adapter à un événement donné ». Le stress est donc une réaction physiologique aspécifique initiée en réponse à un ou plusieurs facteurs d’agression. De ses travaux sur le stress, découle ce qu’il a défini comme étant le syndrome général d’adaptation (SGA), constituant la réponse de l’organisme face à des facteurs d’agression.
Le SGA comprend 3 phases :
- La réaction d’alarme : c’est la phase de réponse immédiate de l’organisme face à un facteur de stress ou agent stresseur. Elle met en jeu l’axe hypothalamo-sympathico-adrénergique qui se traduit notamment par une augmentation des taux plasmatiques des catécholamines comme l’adrénaline.
- La phase de résistance : elle survient lorsque le facteur de stress persiste ou se répète entraînant un état de stress chronique. C’est une phase de résistance spécifique au cours de laquelle l’organisme met en jeu des réactions d’adaptation dépendantes de l’agent stresseur. Elle met en jeu l’axe corticotrope : du cortisol est libéré.
- La phase d’épuisement : elle survient lorsque le stresseur se maintient et que la phase de résistance perdure au de-là des capacités de résistance de l’organisme, ces dernières étant finalement spécifiques à chaque individu. La sécrétion de cortisol submerge les mécanismes de résistance car les récepteurs du système nerveux central ont alors une sensibilité altérée, entre autres, au cortisol ce qui est à l’origine d’une dégradation des fonctions physiologiques et d’une altération de l’homéostasie. Divers symptômes et maladies apparaissent : insomnies, dépression, obésité, hypertension artérielle, diabète etc.
Évidemment, il existe une continuité entre ces phases ; il n’y a pas de séparation nette mais elles schématisent bien la façon dont notre organisme réagit.
Les plantes adaptogènes sont des plantes qui agissent comme des régulatrices, des modulatrices des fonctions de l’organisme lui permettant d’augmenter sa capacité de résistance. D’une certaine manière, elles aident l’organisme à ne pas basculer dans la phase d’épuisement du SGA.
Attention toutefois à ne pas croire qu’elles sont un remède miracle : il ne faut jamais oublier que la guérison et donc le retour à un état d’homéostasie repose sur le traitement étiologique ou l’éviction du facteur déclenchant c’est-à-dire la cause du déséquilibre. Ainsi, dans la problématique du stress, le traitement doit avant tout reposer sur l’éviction de l’agent stresseur, les adaptogènes n’étant qu’un moyen de nous aider à maintenir un état d’équilibre. Elles nous donnent finalement du temps afin de faire disparaître cet agent stresseur en soutenant ainsi le travail de lutte de l’organisme. Ce soutien ne sera évidemment pas infini…
Retenez que les plantes adaptogènes ont donc vocation à aider l’organisme à maintenir l’homéostasie, d’où leur caractère normalisateur. Elles agissent à l’échelle de l’organisme et non pas en ciblant un organe ou une fonction isolée. Elles agissent de façon non spécifique quel que soit l’agent stresseur qui constitue le facteur perturbateur.
C’est ainsi qu’elles se différencient des plantes dites stimulantes. Si les plantes adaptogènes augmentent les capacités de résistance de l’organisme en l’aidant à maintenir son rythme de croisière, les plantes stimulantes donnent un grand coup d’accélérateur dans le fonctionnement de l’organisme lui permettant de fonctionner à un régime supérieur.
Elles donnent un vrai coup de boost qui a tendance à terme, à épuiser l’organisme.
Parmi les plantes stimulantes largement utilisées, on trouve celles qui contiennent de la caféine telles que le café, le thé, le guarana. Vous l’avez déjà entendu dire (ou vous l’avez dit vous-même) : « tiens je vais me prendre un café, j’ai un coup de barre ! ».
La caféine est un alcaloïde qui appartient à la famille des méthylxanthines. Elle est métabolisée au niveau hépatique en 3 isomères de la diméthylxanthine : théobromine, paraxanthine et théophylline.
Les effets stimulants généraux et psychostimulants de la caféine reposent principalement sur sa capacité à inhiber les récepteurs à l’adénosine ; il existe un effet indirect via la libération de dopamine et d’adrénaline.
Les plantes contenant de la caféine ont été utilisées de longue date pour leurs effets stimulants : diminution de la fatigue, augmentation de la vigilance, des performances physiques, etc. D’autres plantes sans caféine sont considérées par l’usage traditionnel comme tonifiantes et stimulantes telles que l’hibiscus, le gingembre.
À la différence des plantes adaptogènes qui normalisent les fonctions de l’organisme et augmentent sa capacité de résistance sur le long terme, les plantes stimulantes épuisent l’organisme et abaissent sa capacité de résistance ; elles ont en outre l’inconvénient, à terme de perturber les fonctions de l’organisme si elles sont utilisées au long cours. C’est particulièrement vrai pour les plantes stimulantes qui contiennent de la caféine.
Retenez donc que les plantes adaptogènes sont des plantes fortifiantes au contraire des plantes stimulantes qui sont excitantes.
Les plantes adaptogènes agissent comme des agents de régulation de notre métabolisme ce qui permet d’augmenter la capacité de résistance de l’organisme : nous sommes ainsi plus à même de nous adapter à notre environnement et nous limitons les conséquences néfastes des facteurs perturbateurs sur notre organisme.
Parmi les plantes adaptogènes, nous pouvons citer :
- L’éleuthérocoque, Eleutherococcus senticosus
- Le ginseng, Panax ginseng
- La rhodiole, Rhodiola rosea
- L’ashwagandha, Withania somnifera
- Le schisandra, Schisandra chinensis
- L’andrographis, Andrographis paniculata
- L’échinacée pourpre, Echinacea purpurea
- L’astragale de Chine, Astragalus mongholicus
Cette liste n’est évidemment pas exhaustive, il en existe d’autres…
Je vous propose d’en découvrir trois : le ginseng, véritable star dans le milieu des adaptogènes, puis l’ashwagandha et l’éleuthérocoque, plus confidentielles même si elles avancent petit à petit sur le devant de la scène.
Le ginseng, Panax ginseng
Surnommé ginseng asiatique ou ginseng coréen, c’est une plante de la famille des Araliacées originaire du nord-est asiatique. Il appartient à la pharmacopée traditionnelle chinoise depuis des millénaires et a la réputation d’être une panacée. Son nom d’ailleurs, Panax vient du grec « pan » tout et « axos » le remède.
Il peut également se vanter d’être l’une des rares plantes à avoir une revue scientifique qui lui est entièrement consacrée : Journal of Ginseng Research, à l’initiative d’une société savante dédiée au ginseng, la Korean Society of Ginseng. Peu de plantes peuvent en dire autant !
Cette notoriété lui permet d’avoir été l’objet d’un très grand nombre d’études scientifiques, certes de qualité parfois inégale mais pour autant, nombre d’entre elles nous ont permis de mieux comprendre les mécanismes d’action du ginseng.
Ce sont d’ailleurs sur ces études que les institutions de santé s’appuient pour émettre leurs recommandations. Elles reconnaissent ainsi l’usage du ginseng dans diverses situations.
- La Commission E allemande : comme tonique à visée stimulante en cas de fatigue, de diminution des capacités de travail et de concentration, en cas de convalescence.
- L’Agence Européenne du Médicament (EMA) : pour soulager les symptômes de l’asthénie tels que la fatigue, la faiblesse (usage traditionnel).
- L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) : en prévention et pour améliorer les capacités mentales et physiques, en cas de faiblesse, d’épuisement, de fatigue, de diminution des capacités de concentration et en cas de convalescence.
- L’ESCOP (European Scientific Cooperative on Phytotherapy) : en cas de diminution des capacités physiques et mentales et en période de convalescence.
Le ginseng renferme un grand nombre de principes actifs tels que des acides phénols, des acides organiques, des phytostérols, des vitamines, des oligo-éléments, des polysaccharides, de l’huile essentielle (sesquiterpènes) mais surtout des ginsénosides qui sont des saponosides stéroïdiens identifiés sous forme numérotée Rbn et Rgn.
C’est une plante adaptogène très puissante avec une action sur la sphère psychique (en cas de grand épuisement intellectuel par exemple) et sur la sphère physique. Elle a d’ailleurs toujours été utilisée dans les épisodes de grande fatigue, en particulier dans le syndrome de fatigue chronique mais aussi afin d’améliorer les performances physiques, en particulier dans le milieu sportif.
C’est aussi une grande rééquilibrante de l’immunité avec un effet immunomodulateur. Elle associe ainsi des vertus anti-inflammatoires mais aussi immunostimulantes selon les situations. Autre intérêt particulièrement intéressant dans la pratique clinique courante c’est sa capacité à optimiser la réponse immunitaire, en particulier dans le cas du vaccin contre la grippe.
Ainsi, le ginseng améliore la réponse vaccinale puisqu’il a pu être démontré une moindre incidence de la grippe et du rhume associée à une augmentation majorée des taux d’anticorps et de l’activité des lymphocytes NK chez des personnes ayant reçu le ginseng en plus du vaccin par rapport au groupe placebo.
Des travaux d’une grande pertinence quand on s’intéresse aux populations fragiles ayant une immunité diminuée et donc une réponse vaccinale amoindrie comme la personne âgée.
Le ginseng n’a, par ailleurs, pas vraiment volé sa réputation de panacée puisqu’il multiplie les propriétés : hépatoprotection, amélioration des paramètres métaboliques etc.
Le ginseng est une plante adaptogène très puissante : c’est la plante de ceux qui sont dans un état de grande fragilité comme la personne âgée en cas de grande fatigue, d’épuisement ou encore pendant une période de grande convalescence. Chez la personne jeune, elle peut être utilisée, mais uniquement dans les périodes de grande fatigue ou si le terrain est très fragilisé.
Des propriétés et des couleurs…
Quand on vous parle de ginseng, on précise parfois ginseng rouge et ginseng blanc. Quelle est la différence et comment choisir ?
S’il s’agit effectivement de la même plante, Panax ginseng, c’est l’âge et le mode de préparation de la racine qui changent. Le ginseng blanc n’est autre que la racine récoltée à maturité, âgée de 4 à 5 ans, qu’on laisse ensuite sécher naturellement, à l’air libre. Elle ne subit ainsi aucun traitement particulier. Le ginseng rouge est une racine récoltée à maturité, âgée d’au moins 6 ans qui subit un traitement particulier. Elle est trempée dans un liquide sucré, passée à la vapeur et séchée.
Ginseng rouge et ginseng blanc n’ont ainsi pas tout à fait les mêmes propriétés car leur composition n’est plus identique. Le ginseng blanc est bien équilibré en principes actifs avec des effets à la fois équilibrants et énergisants.
Le ginseng rouge a perdu certaines saponines à l’origine de ses effets équilibrants (saponines Rb) au profit des saponines tonifiantes et stimulantes (saponines Rg). Par ailleurs, il est en général plus concentré en ginsénosides.
Ces différences font dire à certains que le ginseng rouge est plus puissant. Mon avis est tout autre : il n’est pas pertinent de les comparer en termes de puissance. Il est mon sens préférable de présenter le ginseng blanc comme un excellent rééquilibrant alors que le rouge est un excellent énergisant.
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Modalités d’utilisation :
Teinture mère : 20 à 30 gouttes une à trois par jour (à prendre avant 16 heures) pendant 10 jours puis 5 jours sur 7.
Gélules de poudre de racine séchée : 500 mg à 2 000 mg par jour à répartir en 2 prises, matin et midi pendant 10 jours puis 5 jours sur 7.
Commencez à petites doses que vous augmenterez de façon progressive en fonction de l’évolution de la symptomatologie ; à poursuivre pendant 6 à 8 semaines.
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Précautions d’emploi :
Le ginseng ne doit pas être utilisé en cas d’antécédent de cancer hormono-dépendant, d’hypertension artérielle, de traitement anticoagulant ou antiagrégant plaquettaire, de traitement par inhibiteur de la monoamine-oxydase, d’allergie, d’intolérance et chez la femme enceinte, allaitante et l’enfant. Je déconseille son utilisation en cas de stress intense, d’anxiété importante, de pathologies psychiatriques.
L’ashwagandha, Withania somnifera
Si elle reste encore peu connue en occident, cette plante phare de la médecine traditionnelle ayurvédique n’a rien à envier au ginseng, Panax ginseng, dont elle emprunte presque le nom car elle est parfois surnommée ginseng indien !
Cette plante de la famille des Solanacées nous offre des racines aux propriétés toutes aussi extraordinaires que le ginseng coréen avec, évidemment, ses propres spécificités. Étant de plus en plus étudiée, elle nous livre petit à petit ses secrets par exemple dans sa composition.
Ainsi, elle contient des alcaloïdes, des acides aminés dont le tryptophane, des minéraux et oligo-éléments dont le fer, des flavonoïdes, des acides phénols et surtout des withanolides (lactones stéroïdiques) expliquant en grande partie ses vertus.
C’est une plante à laquelle il faut penser en cas de période de convalescence, de grande fatigue. Grande antioxydante et anti-inflammatoire, elle préserve nos différentes fonctions.
Elle a l’avantage d’agir à la fois sur la sphère psychique en cas de stress, d’anxiété et en plus d’avoir un tropisme cérébral puisque des effets neuroprotecteurs sont évoqués. Ses qualités d’adaptogène ne sont plus à démontrer. Particularité intéressante, elle a une action plus spécifique sur le sommeil. Ses vertus sédatives et calmantes s’expliquent notamment par la présence d’alcaloïdes ; elle favorise ainsi un sommeil réparateur et prévient les réveils nocturnes.
Une piste à considérer quand on connait les chiffres de la prévalence de l’utilisation des benzodiazépines à visée anxiolytique et sédative alors même que leur utilisation à long terme expose au risque avéré de troubles de la mémoire et supposé de syndrome démentiel.
Traditionnellement utilisée dans des pathologies très diverses, elle pourrait être un atout dans certaines maladies chroniques comme le diabète de type 2 ou encore la polyarthrite rhumatoïde.
Pour autant, les institutions de santé n’ont pas encore validé son utilisation. Ainsi, la pharmacopée française la classe dans la liste B des plantes médicinales utilisées traditionnellement en l’état ou sous forme de préparation et dont les effets indésirables potentiels sont supérieurs au bénéfice thérapeutique attendu.
Seule l’OMS s’est avancée en faveur de l’ashwagandha : elle reconnaît son usage comme agent antistress afin d’améliorer la réactivité (usage bien établi par des données scientifiques) et comme tonique général pour augmenter l’énergie, améliorer la santé et prévenir les maladies chez les athlètes et les personnes âgées (usage traditionnel).
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Modalités d’utilisation :
Poudre de racines séchées : 3 g en gélules, deux fois par jour, matin et soir. À̀ poursuivre pendant 6 semaines. Veillez à augmenter les doses de façon progressive sur quelques jours.
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Précautions d’emploi :
Contre-indiquée en cas d’allergie ou d’intolérance, chez la femme enceinte ou allaitante et l’enfant. Sur avis médical en cas de pathologie de la thyroïde, d’hémochromatose et en cas de pathologie auto-immune.
L’éleuthérocoque, Eleutherococcus senticosus
Plante millénaire réputée en médecine traditionnelle chinoise, l’éleuthérocoque est un arbuste épineux de la famille des Araliacées. Son surnom « ginseng de Sibérie » vient faire écho à ses similitudes avec le ginseng, Panax ginseng. Ces deux plantes ont été étudiées par Nicolaï Lazarev puis l’éleuthérocoque fût au centre de toutes les attentions d’Israel Brekhman.
Moins onéreuses que le ginseng, elle avait aussi l’avantage de pousser, entre autres, dans les forêts de l’est Sibérien. Répondant à tous les critères d’une plante adaptogène, l’éleuthérocoque a été pendant longtemps le secret de réussite des sportifs de l’ex-URSS avant d’être découverte par le monde occidental dans les années 1970. Ce sont ses racines qui sont utilisées en phytothérapie, récoltées à l’automne afin de garantir la plus forte teneur en principes actifs.
Ces derniers sont des éleuthérosides, des polysaccharides (éleuthéranes), divers composés phénoliques, des glucides, des acides aminés, des vitamines, des minéraux et oligo-éléments, du bêta-sitostérol etc. Inscrite sur la liste A de la Pharmacopée Française, la racine d’éleuthérocoque fait l’objet d’une reconnaissance d’usage par plusieurs institutions de santé.
- La Commission E allemande : en tant que tonique en cas de période de fatigue, de diminution de ses capacités intellectuelles, de concentration et lors d’une convalescence.
- L’EMA : en cas d’asthénie, de fatigue, de faiblesse (usage traditionnel).
- L’OMS : comme tonique pour améliorer les capacités mentales et physiques en cas de faiblesse, d’épuisement, de fatigue et lors d’une convalescence.
- L’ESCOP : en cas de diminution des capacités physiques et mentales (fatigue, épuisement, diminution des capacités de concentration) et en cas de convalescence.
Son usage traditionnel dans le milieu sportif est pertinent : elle a démontré son efficacité dans l’amélioration des performances physiques tout en permettant une endurance accrue et une réduction de la sensation de fatigue. Elle a en outre l’avantage d’être une plante protectrice du système cardiovasculaire avec des propriétés régulatrices : elle régule la pression artérielle et la fonction cardiaque, en particulier au niveau rythmique.
À noter un effet hypoglycémiant participant à la régulation de la glycémie faisant de cette plante, un choix pertinent chez le patient diabétique ou en pré-diabète épuisé, qui nécessite le soutien de ces fonctions par une adaptogène. C’est une plante immunostimulante avec une action à la fois sur l’immunité cellulaire (médiée par les lymphocytes T principalement) et l’immunité humorale. Elle permettra donc de soutenir les fonctions immunitaires particulièrement impactées par un état de fatigue, d’épuisement.
C’est une plante de choix en période de convalescence, en particulier après une infection, une chirurgie, un traumatisme etc. Il faut aussi penser à l’éleuthérocoque en cas de fatigue intense en lien ou non avec une situation stressante qui déprime les fonctions de l’organisme, en particulier l’immunité.
Modalités d’utilisation :
Teinture mère, à raison de 50 à 100 gouttes matin et midi.
Poudre de racines en gélules : 500 à 1 000 mg en 1 à 2 prises matin et midi.
À poursuivre pendant 10 jours puis 5 jours sur 7 pendant 6 à 12 semaines.
Précautions d’emploi :
L’éleuthérocoque ne sera pas utilisée en cas d’allergie ou d’intolérance, chez la femme enceinte ou allaitante, ni en cas d’hypertension artérielle, sauf si légère et bien contrôlée. Dans ce cas, elle pourra être utilisée sous surveillance. Il existe un risque potentiel d’interaction avec les médicaments antihypertenseurs (et anticoagulants) : un avis médical et une surveillance sont alors nécessaires. Chez l’enfant, il faudra un avis médical avant usage.
Les plantes adaptogènes sont donc des plantes qui soutiennent notre organisme afin de le ramener vers l’équilibre.
Si l’amélioration de nos performances a toujours fait partie des objectifs de l’être humain, nos modes de vie actuels sont une source constante de facteurs de stress qui non seulement entravent nos capacités à performer mais surtout déséquilibrent complètement nos différentes fonctions. Nous ne devrions donc plus être obsédés par l’idée d’aller au de-là de nos possibilités et de nous dépasser, la problématique actuelle est de retrouver notre équilibre, savoir ramener notre organisme à sa ligne de base, avant de lui demander de l’élever.
À la faculté de médecine, lors d’un cas clinique pratique, on nous apprend que la partie concernant la prise en charge doit toujours faire mention du traitement étiologique assorti du traitement symptomatique. L’étiologie est l’étude de la cause des maladies. Le traitement étiologique n’est évidemment pas toujours possible. Pour autant, il doit toujours être évoqué.
Dans la problématique du stress, le traitement étiologique repose sur l’éviction de l’agent stresseur. Les plantes adaptogènes ne se substituent pas à ce dernier. Dans notre cas, elles nous donneront du temps afin de mettre en place une stratégie d’éviction et soutiendront notre organisme dans son combat. Ce soutien est puissant, précieux mais pas indéfini.
Cet article a été rédigé par Laure MARTINAT Médecin anesthésiste-réanimateur phyto-aromathérapeute et naturopathe |