"J'étais souvent dans un état de brouillard cérébral. Je me levais le matin, j’avais l’impression de ne pas savoir réfléchir et dorénavant, cela ne m’arrive plus."
Bonjour Chloë, pourriez-vous vous présenter pour nos lecteurs, s'il vous plaît ?
Bonjour, je suis Chloë Shaw Jackson, et je suis coach en alimentation cétogène et jeûne. J’ai fait des études de biologie et j’ai passé un doctorat en sciences, précisément en biologie moléculaire à l’UCL en Belgique, et j’ai poursuivi avec un post doctorat. J’ai ensuite rejoint l'équipe de l’hôpital Saint Luc en Procréation Médicalement Assistée pour y suivre une formation de 6 mois. Aujourd’hui, je travaille toujours en tant qu’embryologiste à mi-temps mais à l’Hôpital Saint Pierre.
J’ai toujours été attirée par la nutrition, même durant mon parcours en PMA. Un jour, une collègue de travail est arrivée et m’a dit « je vais faire un jeûne », ce à quoi j’ai répondu « moi aussi ». C’est ainsi que j’ai commencé un jeûne qui a duré 5 jours. Pour être franche, j’ai souffert, c’était terrible, parce que je n’y connaissais rien, je ne m’étais pas du tout préparée, je n’avais pris aucune supplémentation, j’ai juste arrêté de m’alimenter pendant 5 jours en continuant simplement à boire de l’eau.
À l’époque, je mangeais très sucré ce qui n’a pas arrangé mon cas. Au cours de ce jeûne, je me suis énormément renseignée, j’ai lu beaucoup de choses, et j’ai appris ce qu’était la cétose, le régime cétogène, etc. Directement à l’issue des 5 jours de jeûne, j’ai donc commencé le régime cétogène et j’ai trouvé cela vraiment intéressant. J’ai alors suivi une formation aux USA avec le Dr Éric BERG, et je me suis aperçue que l’enseignement me plaisait beaucoup, mais qu’un diplôme de coach comme celui-ci ne serait pas suffisant pour faire de l’encadrement.
J’ai donc choisi de poursuivre ma formation au SIIN à Paris, aux côtés du Dr Olivier COUDRON et de Geneviève MOREAU, où j’ai suivi le cursus « Santé Nutrition et Micronutrition » pendant plusieurs années. Plus récemment, je viens de terminer une année de formation en Biologie Médicale appliquée à la Nutrition (SIIN) (analyses biologiques nutritionnelles, bilans, compléments…). En 2019, j’ai enfin pu me lancer comme coach en nutrition, et depuis j’occupe cette activité à mi-temps en parallèle de ma casquette PMA.
Vous êtes spécialiste du régime cétogène. Pourriez-vous nous expliquer en quoi il consiste ?
Le régime cétogène a été développé au début du siècle, initialement pour prendre en charge l'épilepsie. On a constaté que les personnes qui étaient atteintes d'épilepsie, notamment les enfants, étaient protégées des crises lorsqu’elles étaient en période de jeûne.
Néanmoins, il n’est absolument pas concevable de faire jeûner un enfant pendant plusieurs jours, c’est donc comme cela que le régime cétogène est né, afin de « mimer » le jeûne.
Le principe est le suivant. L’insuline est une hormone qui permet entre autres d’internaliser les glucides dans nos cellules afin de produire de l’énergie. Cette hormone va permettre de mettre un peu d’énergie en réserve sous forme de glycogène dans le foie et les muscles et de stocker des réserves de graisses plus conséquentes dans notre tissu gras. Ces réserves sont consommées entre les repas, la nuit et en cas de disette. Or notre alimentation est d’une part très riche en glucides et d’autre part nous mangeons souvent. Nous sommes constamment en mode « stockage » sans aller puiser dans nos réserves. À terme nous développons de la résistance à l’insuline, ce qui ouvre la porte aux maladies de civilisation. Le fait est que lorsqu’il y a plein de glucides disponibles, il y a indéniablement un switch négatif qui s’opère pour nous empêcher d'aller brûler les graisses du corps.
En termes d'évolution, c'est tout à fait logique, car ce sont des réserves en cas de disette. Or aujourd’hui, il n’y a plus de disette ! Lors d’un régime cétogène, on va donc se mettre dans une position où l’on va baisser fortement les glucides, afin de faire baisser l’insuline et par ricochet, aller puiser dans les réserves de graisse du corps ou apportées par l’alimentation. On parlera alors de cétose.
Donc le régime cétogène est comme son nom l’indique un régime, artificiel, pour être en cétose. En réalité, cela nous arrange bien parce qu’on parvient à être en cétose tout en mangeant. Nos ancêtres étaient naturellement en jeûne forcé quand la nourriture venait à manquer. Ce qu’il se passe, c’est que lorsqu’on arrête de manger pendant 24 ou 48 heures, on épuise le glycogène musculaire et dans le foie. Les cellules utilisent les triglycérides comme carburant, et c’est dans le foie et le cerveau que la production de corps cétoniques aura lieu. Ces corps cétoniques sont utilisés pour produire de l’énergie. Par contre, certaines cellules requièrent du glucose pour produire de l’énergie (globules rouges, 30% du cerveau, foie), et c’est donc le foie qui produira du glucose par néoglucogenèse à partir du glycérol ou des protéines. Les glucides ne sont donc pas considérés comme essentiels dans l’alimentation, puisque le corps les produit.
Concrètement, que fait-on dans un régime cétogène ?
On mange beaucoup de gras car ce dernier ne stimule pas l’insuline, on réduit fortement les glucides pour arriver à 20 grammes de glucides nets par jour.
Les glucides nets sont l'ensemble des hydrates de carbone moins les fibres. Les fibres ne stimulent pas l'insuline, donc on n’a pas besoin d'en tenir compte. On va donc vraiment réduire la quantité de glucides, on va manger une abondance de gras, de bonne qualité évidemment (des graines, des oléagineux, des noix, des avocats, du fromage, du beurre, de l'huile d'olive, des poissons gras, des œufs…), modérément des protéines, des légumes verts principalement, des épices, des herbes, des fruits rouges, et à l’issue de cela, on va être en cétose. L'insuline va baisser, très fort, puisque la glycémie va être plus basse et donc on va brûler la graisse qu'on mange (ou celle du corps).
Ce que je trouve extraordinaire, depuis toutes ces années de coaching en nutrition, c'est que le régime cétogène est radical pour perdre du poids, ce qui est assez paradoxal quand on pense à la quantité de gras qu’on ingère. La différence c’est que dans un régime hypocalorique, où les calories qui entrent doivent être moins élevées que celles qui sortent, on va réduire toute source de calorie (le gras, les féculents…), on va se dépenser à fond, on va perdre un peu de poids, mais on va être frustré, on va faire le « yoyo » et en plus, souvent, on oublie que la prise de poids est surtout hormonale, hormones qui rappelons-le, sont orchestrées par l’insuline !
Si je prends l'exemple d’un Snickers par rapport à un avocat : dans le cas du Snickers, vous allez manger du sucre, faire un pic de glycémie et d'insuline, vous allez mettre en réserve, sauf si vous vous dépensez un petit peu. Dans les heures qui suivent, vous allez faire une hypoglycémie réactionnelle, et avoir des fringales toute la journée. Dans le cas de l'avocat, vous allez avoir de la satiété, digérer le gras plus doucement, et vous n’aurez pas de pic de glycémie, donc pas de fringale au cours de la journée et l’insuline ne sera pas stimulée.
Quand on mange en régime cétogène, la grande différence par rapport à des régimes classiques, c'est qu'on n'a pas faim et de surcroît, on mange très bien, donc on tient sur du plus long terme. Ce qui est fondamental dans un régime, c'est de changer les habitudes alimentaires, et chacun sait que ce n’est pas le plus facile.
À titre personnel, si je regarde comment je mangeais il y a 20 ans : je buvais du thé au lait avec du sucre, je mangeais du granola, des fruits à longueur de journée, des pâtes, etc. Aujourd’hui ce n'est plus du tout le cas : je bois du café avec un lait végétal, je mange occasionnellement des pâtes, je mange plutôt des fruits à index glycémique bas et de temps en temps, une banane ou une mangue. Je mange du chocolat à 85 % et plus de chocolat blanc, ni de barres chocolatées… C’est essentiel de changer les habitudes alimentaires et ça, ça prend du temps, donc pendant ce temps-là, on doit être à l'aise dans ce qu'on mange. Je vous invite à regarder sur mon site internet www.nutri-keto.com ou sur mon compte Instagram @nutri.keto, j’y publie régulièrement des recettes et c’est très gourmand.
Je me permets de faire simplement une parenthèse : lorsqu’on regarde la pyramide alimentaire avec la grosse base d’hydrates de carbone (parce qu'on dit qu'il faut beaucoup d'énergie pour le cerveau), je suis tout à fait d’accord. Néanmoins, beaucoup de glucides, non ! Puisque si on les enlève, on survit très bien.
La seule chose, c'est qu'en fait nos ancêtres étaient métaboliquement flexibles. On a hérité de cette capacité de brûler, d'utiliser le glucose comme carburant en alternance avec nos réserves de graisses, mais on est constamment dans un mode d’utilisation des glucides. On mange des glucides comme si on allait aux Jeux olympiques en réalité, alors qu’on peut vraiment les diminuer. Il est vrai que les glucides ne sont pas nécessaires pour la survie puisqu'on sait les synthétiser, mais on ne cherche pas à survivre. On cherche à être dans une forme olympique et donc sur le long terme, c'est intéressant d'introduire des « aliments vedettes », qui sont un peu plus riches en glucides mais qui ont des bénéfices santé énormes : une pomme, des patates douces, des lentilles, une carotte… On ne peut pas être en cétose avec tout cela mais par période, c'est essentiel de les réintégrer dans son alimentation afin d’avoir des fibres, des antioxydants, des vitamines, des minéraux, etc.
En réalité, c'est plus intéressant d'être métaboliquement flexible. Me concernant, cela fait des années que je mange en cétose par période. Soit j'y parviens en faisant un jeûne, mais ce n'est pas très amusant de jeûner 2 ou 3 jours d’affilée régulièrement, soit je mange en cétose et puis par période j'augmente les glucides de manière saine en mangeant des aliments vedettes qui se rapprochent plus d'une alimentation méditerranéenne, ce qui me fait sortir de cette cétose.
Y a-t-il un inconvénient à se lancer dans le régime cétogène ?
En réalité il y a un problème récurrent avec ce régime, c'est que lorsque les gens se lancent, ils ont tendance à calculer les macros de manière stricte, c’est-à-dire à respecter scrupuleusement les 20 grammes de glucides nets. Si on prend une courgette, disons 100 grammes de courgettes, on va déjà être à 3 grammes de glucides nets.
Donc vous imaginez si l’on commence à calculer, on finit par manger de la viande, du poisson, des œufs, un tout petit peu de légumes verts, un tout petit peu d'oléagineux, etc.
Dans ce cas-là, c’est un régime qui peut devenir extrêmement déséquilibré et contraignant. Me concernant, je ne travaille pas du tout de cette façon-là. Quand je demande de démarrer un régime cétogène, je ne fais pas de mathématiques, je ne fais pas des calculs avec des macros, je demande de respecter une certaine charte alimentaire et le principe sera de manger abondamment des légumes verts (épinards, brocolis, courgettes), peu importe qu'il y ait 2 ou 3 grammes de glucides par 100 grammes d'aliment, cela n'empêchera pas de basculer en cétose. Vous aurez de surcroît le bénéfice d'avoir un peu plus de fibres, de vitamines, de minéraux, d'antioxydants, pour que ce soit plus équilibré. Par ailleurs, je rajoute énormément d’épices, d’herbes, d’oléagineux, des fruits rouges, etc.
Pourquoi avoir choisi de vous spécialiser dans le régime cétogène ?
Il y a plusieurs années, on m'avait diagnostiqué un foie gras. À l’époque je n’y connaissais rien en nutrition et j'ai dit à mon mari « ouh là, je suis Française et je vais devoir arrêter le beurre, la crème, au secours ! ». Bien évidemment, je n’avais pas du tout compris, et pour finir, je ne m’en suis pas du tout préoccupée.
Des années plus tard, en m'approchant de la ménopause, j'ai commencé à voir un peu de graisse viscérale s’installer, mes enzymes hépatiques étaient augmentées dans mes prises de sang, et en effectuant mes recherches sur le régime cétogène ça m’a fait « tilt ».
Je me suis dit « j'y vais, ça peut être très intéressant » et en effet, j'ai démarré le régime cétogène. J'ai perdu 9 kg et très rapidement toute ma prise de sang s'est normalisée, mon foie était impeccable. En parallèle mon mari avait un diabète de type 2 donc je me suis dit que c’était l’occasion de faire cela à deux. Pour lui, ça a été beaucoup plus difficile que pour moi.
Il avait beaucoup de graisse ventrale, il était stressé, il ne dormait pas bien, il était déjà sous metformine avec les triglycérides au plafond, un mauvais profil de cholestérol, etc. Ça lui a pris beaucoup de temps de perdre du poids, beaucoup de temps pour basculer en cétose, mais au bout d’une année, il a été déclaré à Saint Pierre totalement guéri de son diabète de type 2. Il a pu arrêter tous ses médicaments, on a fait un fibroscan au niveau du foie, tout était normal. Sur lui, les bénéfices ont été vraiment flagrants.
Quels sont les mécanismes qui se produisent dans le corps lors d'un tel régime ?
Lorsqu’on mange, les glucides qu'on ingère vont être internalisés dans les cellules, qui vont produire de l’ATP, l’énergie nécessaire aux fonctions vitales et à notre activité physique. Tout ce qui ne sera pas consommé sera stocké dans le foie, dans les muscles, dans les tissus gras. Et lorsqu’on ne mange pas, au bout de quelques heures, notre glycémie baisse.
Le foie va donc progressivement libérer le glycogène pour alimenter les cellules. Si encore une fois, on ne mange pas, le glycogène va progressivement arriver à épuisement, et c’est ainsi que le corps va utiliser les triglycérides en les transportant jusqu’au foie, qui va les transformer à son tour en corps cétoniques.
C'est véritablement lorsque l'insuline baisse que le corps commence à utiliser le gras comme carburant principal. Les corps cétoniques vont ensuite pouvoir passer la barrière hémato-encéphalique pour aller nourrir le cerveau, qui est d’ailleurs friand de ces derniers qui contribuent à son bon fonctionnement.
Néanmoins, lorsqu’il y a des glucides, il est clair que la première chose que le corps va faire c'est de les utiliser en priorité, parce qu’on ne peut pas avoir une glycémie qui monte trop, cela devient vite toxique.
Le régime cétogène est très connu pour ses objectifs d’amincissement, le recommandez-vous exclusivement pour cela ?
Avec ce que je viens de vous expliquer, le régime cétogène s’avère effectivement très intéressant pour perdre du poids. Néanmoins, je suis en cétose régulièrement sans perdre un gramme.
Comme il suffit de jouer sur le curseur du gras, il est clair que c'est facile de perdre du poids. Toutefois, si vous augmentez vos calories en augmentant le gras, vous allez brûler le gras que vous consommez, et non le gras de votre corps. Il est donc possible de prendre du poids en cétose.
Si l’intérêt du régime cétogène ne résidait que dans un objectif de poids, je ne serais pas en cétose aujourd'hui ! Il y a des bénéfices santé énormes au-delà de cela.
La première chose, c'est qu'il faut bien se dire que nos ancêtres, lorsqu’ils étaient en cétose, devaient se lever dans leurs grottes, pour aller chasser, sans avoir mangé depuis plusieurs jours. Nos corps sont dotés d’un mécanisme de survie, on a une clarté mentale incroyable et ça, tous mes clients qui sont en cétose le ressentent. On a un regain d'énergie. Personnellement, j’étais souvent dans un état de brouillard cérébral. Je me levais le matin, j’avais l’impression de ne pas savoir réfléchir et dorénavant, cela ne m’arrive plus. D'ailleurs, aujourd’hui, quand j'ai une réunion très importante, je me mets en cétose 24 heures avant pour être bien alerte mentalement le jour J.
Ensuite, quand on est en cétose, on produit plus d'ATP à partir des corps cétoniques et moins de stress oxydant. C’est d’ailleurs particulièrement intéressant pour les mitochondries qui peuvent facilement être vulnérables.
Par ailleurs, les corps cétoniques ont un effet direct au niveau anti-inflammatoire.
Enfin, n’oublions pas l’Effet de Warburg. En effet, au sein des cellules cancéreuses, lorsque les mitochondries sont défectueuses, c’est la fermentation peu efficace dans le cytoplasme qui procure de l’énergie à la cellule. Si on les prive de glucides, cela signifie qu’on coupe une partie de leur carburant, ce qui peut donc être intéressant en prévention mais aussi en accompagnement des thérapies classiques de cancer.
Bien entendu, on est au début de tout cela, mais la cétose présente quoi qu’il en soit des bénéfices santé importants, notamment au niveau cérébral (migraine, glioblastome, épilepsie, maladie d'Alzheimer…).
De nombreuses personnes viennent me voir pour perdre du poids, et je propose à la majorité d’entre elles d’apprendre à leur corps à utiliser le gras, et à basculer en cétose, ne fût-ce que pour quelques semaines, pour ensuite revenir sur quelque chose de cyclique. Cela s’adresse aussi aux personnes atteintes de fibromyalgie par exemple, de migraines, de syndromes métaboliques, de foie gras, etc.
En combien de temps constate-t-on des améliorations en suivant un régime cétogène ?
Au début, c'est très difficile parce que quand on réapprend au corps à brûler le gras, cela prend du temps afin que la machinerie cellulaire se réactive. Dans cette période de transition, on peut même être très mal. Il y a la fameuse « grippe cétogène », mais sincèrement, parmi les personnes qui viennent me voir, c'est très rare de la voir. Quand l'insuline baisse, vous perdez du sel, de l'eau, du magnésium, du potassium et donc avec cela, vous pouvez avoir des crampes musculaires, des nausées, des maux de tête, de la constipation.
Néanmoins, il suffit de boire suffisamment d’eau, d’augmenter vraiment le sel et de se supplémenter en potassium, en magnésium et en triglycérides à chaînes moyennes pour que cela soit plus facile à traverser.
J'ai fait moi-même les frais de cette phase de transition au cours de mon premier jeûne, mais une fois qu'elle est derrière soi, on commence à ressentir les bénéfices.
Par ailleurs, lorsqu’on met en place ce type de régime de façon chronique, la mémoire corporelle fait que votre corps ne réagit plus de manière aussi « virulente ». Parce que votre corps connaît ce système et les mécanismes associés, il y répond directement.
En revanche, d’une personne à l'autre, le passage en cétose varie. Si je prends l’exemple de ma fille de 22 ans, elle bascule automatiquement. Mon mari en revanche, a plus de difficultés. Cela dépend de votre métabolisme, de ce que vous avez mangé, de la santé de votre foie, etc.
Le régime cétogène est-il adapté à tout le monde ou présente-t-il des risques ?
Un régime cétogène mal fait, c'est une catastrophe. Aux États-Unis par exemple, on consomme beaucoup d’entrecôtes, de l’érythritol (un édulcorant naturel), de la crème fraîche et du lard ; tout ceci mis bout à bout, nous sommes bien d’accord, ce n’est pas terrible, bien que ce soit du gras. Il faut a minima nourrir les bactéries du côlon, il faut des antioxydants, Des apports de graisses mono et polyinsaturées, etc.
Un régime cétogène bien fait, c’est très bien, mais cela ne me viendrait pas non plus à l’idée de le faire à vie. Cela reste un régime et le but c'est de revenir à des habitudes alimentaires métaboliquement flexibles.
Ceci étant, je ne proposerais pas de régime cétogène à une femme enceinte ou allaitante, parce que justement je trouve qu'il faut intégrer ces aliments vedettes pour avoir un maximum de variétés, de polyphénols, etc. Elle peut donc manger des fruits, plutôt à IG bas, mais cela n’empêche pas de manger une mandarine, une pomme, une poire, des dates plusieurs fois par jour, des légumes racines, des légumineuses, un peu de céréales complètes…
En ce qui concerne le diabète de type 1, c'est très délicat parce qu’il y a quand même un risque d'acidose et donc dans ce contexte, je préfère préconiser de manger 3 repas réguliers avec une alimentation plus variée mais tout de même plus basse en glucides.
Il faut être vigilant en cas d'insuffisance hépatique parce que dans le régime cétogène, le foie est très sollicité. C'est quand même lui qui doit produire les corps cétoniques.
Enfin, en cas de cancers, c’est encore une très vague discussion. Il est évident qu'il y a des bénéfices à mon sens : un cancer aime bien un environnement inflammatoire, où il y a des glucides qui peuvent servir de carburants aux cellules cancéreuses, mais en même temps il faut être extrêmement vigilant parce qu’on est susceptible de perdre du poids, donc si l’on bascule en dénutrition, cela aura un effet inverse.
Mon principe lorsque je suis en présence d’un cancer, (parce que j’ai de nombreuses personnes qui viennent me voir dans ce contexte-là), est de mettre en parallèle un régime cétogène avec leur chimiothérapie-radiothérapie pendant quelques semaines, pour basculer en cétose en surveillant vraiment bien que la personne ne soit pas en dénutrition.
Pour cela, je les suis assidûment et je travaille par bio impédance multifréquence ainsi qu’avec un bilan sanguin doté de l’indice de PINI, etc. Et puis on repart avec les aliments vedettes pendant quelque temps. On travaille comme cela, par phases.
Alors évidemment, si on est anorexique, il faut redoubler de vigilance. Même si comme je l’ai précisé, il est possible de suivre un régime cétogène sans perdre de poids, les troubles du comportement alimentaire sont à considérer au cas par cas avec la plus grande attention. On exclura plutôt le jeûne que le régime cétogène dans ce cas.
En cas de prise de médicaments, il convient de s’assurer avec son médecin que le régime cétogène n’entravera pas leur efficacité. Dans le diabète de type 2 par exemple, certains médicaments couplés à un régime cétogène peuvent conduire à une acidose.
Quoi qu’il en soit, lorsqu’on veut démarrer un régime cétogène, il faut toujours en parler à son médecin. En tant que docteur en sciences, je collabore avec des médecins et dès que j'ai le moindre doute sur une situation, j'envoie mes consultants chez le médecin nutritionniste pour évaluer la situation.
En conclusion, c'est quand même mieux d'être accompagné quand on se lance dans un régime cétogène. Ce n’est pas un régime facile à faire, surtout si l’on n’a pas de background scientifique.
Est-ce que vous pouvez nous donner un exemple d'une journée d'alimentation ?
Bien sûr. Pour le petit-déjeuner, et bien sans surprise on exclut les glucides, donc on va pouvoir consommer par exemple des œufs, sous toutes leurs formes (brouillés par exemple) avec un avocat, une tranche de saumon, des tomates cerises, de la salade, un yaourt protéiné (style petit Suisse).
On peut rajouter de la purée d'amande, des fruits rouges congelés en hiver, des oléagineux, etc. Pour les amoureux du pain, on peut manger du pain cétogène (à base d’oléagineux, de graines, de noix, de purée d’amande et d’œuf), avec du beurre et des fruits rouges par-dessus, ou du fromage, du jambon et des crudités.
C’est une habitude difficile à prendre pour nous, en France ou en Belgique, qui sommes attachés à notre traditionnel « pain – beurre – confiture », mais lorsqu’on suit le régime cétogène, on peut manger une entrecôte avec des légumes grillés et de la salade au petit-déjeuner si l’on en a envie !
Avec cela, je prends un café dans lequel je mets un lait végétal, de la crème fraîche et de la poudre MCT, extraite de la coco. Ce sont des chaînes moyennes de triglycérides, contenant de l’acide caprylique. En dehors du fait que cela désinfecte les intestins, le MCT va aller directement au cœur des mitochondries pour produire des corps cétoniques. Cela vous pousse en cétose, vous aide à jeûner, et l’avantage est que cela coupe légèrement la faim.
En fait le petit-déjeuner peut être un repas du soir ! Ensuite, avec ce petit-déjeuner, je n’ai souvent plus faim jusqu’à 14 heures environ. Et là, je vais prendre un repas important.
Cela peut être par exemple un hachis Parmentier, où je remplacerai la purée de pommes de terre par de la purée de chou-fleur, sur laquelle je parsèmerai du fromage gratiné, accompagné d'une grande salade, ou bien ce peut être un curry de poulet avec des légumes, du lait de coco, servi avec du riz de chou-fleur ou des pâtes au soja qui sont réduites en glucides…
Après ce repas, je vais encore prendre un petit repas, un goûter, composé par exemple d’un yaourt de coco avec des fruits rouges congelés, d’un peu de purée d'amande, d’un café, à l’issue duquel je jeûnerai jusqu’au lendemain. Voici pour moi, une journée type.
Est-il nécessaire de se supplémenter quand on suit un régime cétogène ?
Au début certainement, parce que lorsqu’on bascule en cétose comme je l'ai expliqué, on perd de l'eau, du sel, du magnésium, du potassium… Donc prendre un complexe de magnésium et potassium est fortement recommandé. Un citrate de magnésium d’ailleurs va améliorer le transit en début de cétose.
De toute façon, la majorité de la population est déficitaire en magnésium donc tous ceux qui viennent chez moi reçoivent d’office du magnésium ainsi que de la vitamine D.
Ensuite, je surveille le bilan sanguin. Je fais toujours un bilan alimentaire écrit d'une semaine pour voir s’il y a assez de légumes verts, si les repas sont assez variés, s’il y a de la couleur, suffisamment d’épices, des herbes…
Et puis je regarde la B9, la B12, le zinc, le sélénium, la K2-D3, les oméga-3… Mais tout ceci n’est pas lié au régime cétogène. C’est vraiment en fonction du bilan du consultant.
Vous êtes particulièrement active sur les réseaux sociaux. Pensez-vous qu'ils soient incontournables aujourd'hui pour sensibiliser les plus jeunes à l'importance de l'hygiène alimentaire ?
Je trouve que c'est un moyen de communication extraordinaire. Je veux dire, par ces réseaux, je touche des gens dans le monde entier, surtout francophones. Je communique avec des gens du Canada, d’Algérie, de Suisse, c’est un moyen de communication fabuleux.
L'autre jour, pour l’anecdote, j'étais à l'hôpital Saint Pierre et en l'espace de 3 minutes, j'ai croisé une patiente qui sortait de chez le stomato qui m'a dit « Oh NutriKéto ! », puis une première infirmière, puis une seconde…
Et en fait, ce qui est fabuleux, c'est que quand vous travaillez avec les réseaux, vous apportez des conseils, et certaines personnes ne viennent pas me voir mais m'envoient un message pour me faire part de leurs évolutions :
« J'ai démarré la luminothérapie, je dors mieux, j'ai perdu 15 kg grâce à vous, j’ai appris tellement de choses… ».
Le danger c’est qu’il y a certaines personnes qui obtiennent un diplôme de coach en 2 ou 6 mois et donc il faut vraiment faire attention à qui se cache derrière les comptes. Il faut veiller à aller voir des professionnels de santé qui ont un diplôme valable.
Par ailleurs, même dans le monde de la nutrition et de la santé, on va avoir des contradictions.
Par exemple, moi je vais dire que c’est bien de boire du café parce que c’est riche en antioxydants, lorsqu’un autre affirmera le contraire. Parfois, ce n'est pas évident pour les personnes qui sont sur les réseaux sociaux de suivre et d'avoir des informations sûres.
Et puis c’est important d'être à l'écoute de son corps, si on boit du café, qu'on a des palpitations et que le corps n'est pas bien, alors bien évidemment, on arrête.
Ceci étant, bien qu’il faille être vraiment prudent, c'est un moyen de communication exceptionnel.
Si vous deviez sélectionner 3 aliments chouchous dans le cadre du régime cétogène, quels seraient-ils ?
Alors, le premier serait le chou-fleur, parce qu’il est riche en sulforaphane, en vitamines C et A, et ne comporte pas de glucides. Vous allez pouvoir faire de la purée, du riz, un risotto, un taboulé, un hachis Parmentier… Le chou-fleur est très vertueux donc fabuleux.
Un deuxième aliment chouchou, serait pour moi la purée d’amande. Elle est exquise, faible en glucides et vous pouvez la mettre dans le pain, dans du yaourt.
En troisième je mettrais les œufs, évidemment. Les œufs bleu blanc cœur, label bio, sont extraordinaires parce que l'œuf est un multivitamine. De surcroît, si vous choisissez bien les filières, vous allez bénéficier d’EPA-DHA, et en plus ça ne coûte pas grand-chose.
Pour terminer, pouvez-vous nous proposer deux recettes de votre carnet de cuisine personnel ?
Bien sûr, en voici une salée et une sucrée !
Hachis Parmentier "Cottage pie" de @nutri.keto 4 personnes |
Moelleux au chocolat de @nutri.keto 6 fondants |
Ingrédients :
Préparation :
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Chloë SHAW-JACKSON Coach en alimentation cétogène et jeûne |