En 1811, le chimiste Bernard Courtois fit une découverte majeure en isolant une substance à partir d'algues marines au cours d’un processus de production de salpêtre durant les guerres napoléoniennes. Cette substance, à l'époque inconnue, émettait des vapeurs violacées lorsqu’elle était chauffée. En référence à ces reflets violets caractéristiques, Gay-Lussac lui attribua le nom d'iode. En effet, l'origine de ce nom remonte au terme grec ancien "ioedes," signifiant "couleur de la violette". Ce n’est seulement qu’après la naissance de la médecine moderne que l’iode apparaît comme un oligo-élément vital dans le bon fonctionnement de l’organisme.
Dans cet article, nous explorerons en détail les fonctions essentielles de l'iode dans l'organisme, les symptômes et les conséquences graves liées à une carence en iode, ainsi que les meilleures méthodes de supplémentation pour maintenir une santé optimale.
LES FONCTIONS DE L'IODE DANS LE CORPS
L'iode est un élément chimique présent dans la nature et qui est essentiel à la vie humaine. L'une des fonctions les plus connues de l'iode est sa participation à la synthèse des hormones thyroïdiennes, notamment la thyroxine (T4) et la triiodothyronine (T3). Ces hormones sont réputées pour leur action sur la régulation du métabolisme, la croissance, la température corporelle ainsi que sur de nombreuses autres fonctions vitales.
L'iode joue un rôle vital dans le métabolisme énergétique en influençant la fonction de la glande thyroïde. En effet, cette glande endocrine est entièrement dédiée à l’incorporation des ions iodures pour la fabrication des hormones thyroïdiennes, permettant de réguler le métabolisme de base de l'organisme. Ces hormones sont responsables de la conversion des nutriments en énergie utilisable par les cellules. Elles régulent également la température corporelle et favorisent la croissance cellulaire. Ainsi, l'iode maintient un métabolisme équilibré, favorise la combustion des calories et contribue à la production d'énergie nécessaire au bon fonctionnement de l'organisme.
Les hormones thyroïdiennes sont également essentielles pour la croissance et le développement cérébral et neurologique à toutes les étapes de la vie. Elles
contrôlent la migration et la maturation des cellules cérébrales et facilitent la communication entre celles-ci. En période postnatale, durant les premiers mois de vie, les hormones thyroïdiennes ont un rôle primordial dans la mise en place et la maturation des connexions neuronales. La carence en iode peut avoir des conséquences graves sur le cerveau. Au niveau du système nerveux central, les hormones thyroïdiennes augmentent l’état de vigilance. Elles stimulent le système nerveux végétatif à l’origine d’une accélération du transit et de la motricité intestinale.
Enfin, les hormones thyroïdiennes interviennent également dans d'autres aspects de la santé, notamment le développement et le maintien des muscles (synthèse de la myosine), la maturation osseuse, la régulation du système cardiovasculaire (fréquence et débit cardiaque notamment), la gestion du poids corporel, la digestion et divers autres processus métaboliques et physiologiques. En conséquence, l'iode joue un rôle essentiel dans la régulation de nombreuses fonctions corporelles fondamentales, contribuant ainsi au bien-être et à la santé globale.
LA CARENCE EN IODE : UNE RÉALITÉ SOUS-ESTIMÉE
En 1990, une inquiétante constatation a émergé : environ 30 % de la population mondiale était exposée à un risque de carence en iode. Face à cette situation alarmante, l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a préconisé une mesure préventive majeure : l'enrichissement du sel de table en iode (1860μg/100 g contre 1,8μg/100 g pour du sel non iodé). Cette initiative visait à considérablement améliorer la situation en réduisant les carences en iode dans de nombreux pays. Toutefois, malgré les progrès accomplis, la carence en iode persiste comme une problématique de santé majeure. Les troubles associés à la carence en iode figurent toujours parmi les problèmes les plus courants et évitables dans le monde.
En 2007, on considérait qu’environ 2 milliards d’individus étaient encore touchés par une carence en iode à travers la planète, tandis que 50 % de la population européenne souffrait d’une déficience légère. D’après l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), environ 50 millions de personnes souffriraient de lésions cérébrales dues à une carence en iode. Ces lésions peuvent entraîner une diminution du développement des fonctions cognitives et diminuer le QI de 10 à 15 points par rapport aux personnes non carencées.
Ces chiffres mettent en évidence que la carence en iode est un problème de santé répandu à l'échelle mondiale, touchant des populations de tous les horizons. Il demeure donc crucial de poursuivre les efforts de sensibilisation à cette problématique et de mettre en place, lorsque nécessaire, des mesures de supplémentation adéquates afin d'assurer des apports en iode optimaux pour chaque individu.
Le saviez-vous ?Le crétinisme, une maladie associée à une carence en iode dans l'environnement, était autrefois répandu dans les régions éloignées des côtes, où l'accès à des sources d'iode issues de la mer était limité. Cette condition était à l'origine de l'expression familière "crétin des Alpes". Le crétinisme est une hypothyroïdie congénitale se manifestant par un retard mental sévère, des retards de croissance physique, des anomalies faciales (visage bouffi, goitre, hypertrophie de la langue), de la surdité, de la mutité et des problèmes neurologiques. |
QUI EST CONCERNÉ ?
L'iode, bien qu'indispensable à l'organisme, demeure un oligo-élément que notre corps ne peut produire par lui-même. Par conséquent, il revêt une importance capitale de veiller à son apport à travers une alimentation appropriée. L'iode est naturellement abondant dans les océans, et il se retrouve en quantités significatives dans les poissons, les crustacés et les algues. D'autres sources alimentaires, telles que le jaune d'œuf ou le lait peuvent également contribuer à satisfaire nos besoins en iode. Il est crucial de noter que des apports alimentaires insuffisants ou des perturbations de l'assimilation de l'iode, comme celles observées dans les cas de dysbiose, de maladies inflammatoires chroniques de l'intestin (MICI) ou de syndrome de l'intestin irritable (SII), peuvent favoriser le développement d'une carence en iode. De plus, il convient de prendre en compte la variabilité des besoins en iode selon chaque individu, influencée par des facteurs tels que l'âge, le sexe, le métabolisme de base et des exigences particulières liées au métabolisme.
Ainsi, les femmes enceintes se trouvent particulièrement vulnérables à la carence en iode, car elles doivent non seulement répondre aux besoins de leur propre organisme mais aussi à ceux du fœtus en développement. C’est pourquoi, tout au long de la grossesse et pendant la période d'allaitement, les besoins en iode augmentent, passant de 150 mcg/jour à 250-300 mcg/jour.
Il est important de noter qu’au cours de la grossesse, une insuffisance en iode augmente le risque de fausses couches et de malformations congénitales. Même une carence légère en iode pendant la grossesse, la petite enfance ou l'enfance peut engendrer des dommages irréversibles au système nerveux en plein développement et entraîner une réduction des capacités cognitives des enfants pendant leur scolarité et au-delà. Cette même augmentation des besoins en iode est observée chez les sportifs en raison de l'excrétion de l'iode par la transpiration.
La supplémentation en iode s'avère donc intéressante pour combler les carences potentielles et garantir un apport adéquat, quelle que soit la situation individuelle. Elle peut se révéler particulièrement bénéfique pour des groupes de population vulnérables, notamment les femmes enceintes, les sportifs, les personnes souffrant de troubles de l’absorption ainsi que celles suivant un régime alimentaire restrictif pouvant entraîner une consommation réduite en iode.
COMMENT ÉTABLIR UNE CARENCE EN IODE
Un établissement précoce est intéressant pour prévenir les conséquences néfastes d’une carence en iode sur la santé. En effet, une carence en iode non traitée peut avoir d’importantes répercussions sur le bien-être et la santé générale. L'évaluation précoce permet donc de mettre en place rapidement des mesures de supplémentation en iode en fonction des besoins individuels, afin de rétablir des niveaux adéquats dans l'organisme et de prévenir les complications à long terme.
L'établissement d'une carence en iode passe principalement par l’évaluation des signes cliniques impliquant la présence d’un goitre ainsi que des manifestations d’hypothyroïdie. Le goitre résulte de l'augmentation de la taille de la thyroïde due à une multiplication des cellules thyroïdiennes. Il est le signe extérieur d’une perturbation plus profonde. Ce phénomène est considéré comme une réponse physiologique à un déficit chronique d'iode, visant à accroître la capture d'iode par la glande thyroïde. On estime que la thyroïde commence à compenser la carence en augmentant son volume lorsque les apports sont inférieurs à 50 μg/jour chez l’adulte. Progressivement, l'activité de la thyroïde baisse, compromettant ainsi la production des hormones T3 et T4, et entraînant une hypothyroïdie. Les manifestations de l’hypothyroïdie se traduisent par une prise de poids, de la fatigue mentale et physique, une sensibilité accrue au froid, une baisse des performances intellectuelles, une diminution de la fertilité, une perte de cheveux ainsi que par l’apparition d’une peau sèche et squameuse. Il est aussi important de souligner que la carence en iode peut affecter la santé du cerveau, en particulier chez les enfants en développement, ce qui peut avoir des répercussions tout au long de la vie.
- Le dosage de l'iode urinaire (iodurie), peut offrir également une estimation de l'apport en iode. Un taux d'iode inférieur à 110 mcg/L indique un déficit d'apports iodés. Toutefois, cette mesure n’est que peu informative sur le statut iodé à long terme étant donné la grande variabilité d’apport d’un jour à l’autre. Néanmoins à l’échelle des populations, elle peut être utilisée dans les grandes études épidémiologiques.
- Le dosage des hormones thyroïdiennes peut aussi révéler les impacts d’une carence en iode, se manifestant par une réduction de la production des hormones T3 et T4. De plus, l'hypothalamus réagit à une carence en iode en sécrétant davantage d'hormone thyréotrope (TRH), stimulant ainsi la sécrétion de thyréostimuline (TSH) par l'hypophyse. Le diagnostic de carence en iode peut donc également s’appuyer sur des analyses sanguines, révélant des taux bas d'hormones thyroïdiennes ou des taux élevés d'hormone de stimulation de la thyroïde (TSH). Des examens d'imagerie tels que l'échographie et la scintigraphie thyroïdienne peuvent également être requis mais sont rarement indiqués en première intention.
QUELLE SUPPLÉMENTATION CHOISIR ?
Idéalement, la première source d'iode devrait être une alimentation équilibrée et diversifiée. Pour rappel, les aliments riches en iode comprennent les poissons, les fruits de mer, les algues, le lait, les œufs et certains légumes cultivés dans des sols riches en iode. Cependant, la quantité d'iode dans les aliments peut varier considérablement en fonction de la région géographique et des habitudes alimentaires.
Lorsque les apports en iode sont insuffisants, il est intéressant d’apporter un complément pour rétablir des niveaux optimaux dans l’organisme. À noter que l’intégralité des apports journaliers recommandés est couverte par 150mcg d’iode par jour.
Pour ce faire, les algues marines sont naturellement riches en iode. Elles constituent donc d’excellentes sources d’iode naturel et 100 % végétal, particulièrement utiles pour les personnes suivant un régime végétarien ou végétalien. De plus, les algues absorbent l'iode issu de l'eau de mer et concentrent cet oligo-élément, en faisant ainsi une source naturelle et biodisponible.
Le choix de la meilleure source pour une supplémentation en iode dépend de plusieurs facteurs, notamment la qualité, l'origine ou encore le type d'algue. Également appelée kelp, la laminaire (Laminaria digitata) est l’une des algues les plus utilisées en raison de sa teneur naturellement élevée en iode. Toutefois, il est important de rechercher des produits de haute qualité provenant de sources fiables.
Ainsi, les algues cultivées dans des zones marines propres et non contaminées sont préférables (soumis à des tests de pureté et de sécurité). Optez donc pour une algue de haute qualité et si possible, recherchez des informations sur la provenance spécifique des algues utilisées dans le produit. Certaines régions du monde, telles que la Bretagne, sont réputées pour la culture d'algues de haute qualité.
Dans notre monde en perpétuelle transformation, où les enjeux liés à la santé sont en constante évolution et où la sensibilisation à la nutrition prend une place de plus en plus prépondérante, il est impératif de prendre conscience de l'impact profond que nos choix alimentaires et nos habitudes de vie peuvent avoir sur notre bien-être à long terme. La nutrition ne se réduit donc pas à une simple énumération d'éléments nutritifs, parmi lesquels l'iode occuperait une simple place. En réalité, l'iode, avec ses multiples implications pour le métabolisme, la croissance et le développement cérébral, nous rappelle de manière incontestable que même les plus modestes éléments jouent un rôle essentiel dans la quête d'une vie saine et équilibrée !